Sandrine Gestin, l’art en fantasy
Il va sans dire que Sandrine Gestin est, à trente ans, l’une de nos plus grands espoirs de l’illustration française de fantasy. D’ailleurs, ses dessins et surtout ses tableaux (que vous pouvez découvrir tout au long du premier numéro de Faeries), sont tout à fait dignes des plus grands Vermeer, de la Tour et autres préraphaélites.
Non, la comparaison n’est pas exagérée, il suffit de se pencher sur ses toiles pour s’en convaincre :
Il y a d’abord la finesse des traits, la grande précision d’exécution qui nous ferait presque croire que les portraits qu’elle nous présente sont ceux de personnages réels, alors qu’il est bien évident que les nombreux détails qui se sont immiscés dans la toile poussent notre raison à penser le contraire : les oreilles pointues des personnages, les lutins malicieux qui se sont glissés dans le décor…
Et puis, bien sûr, il y a ces scènes d’intérieur, avec cette lumière si particulière : l’âtre d’un feu, la lumière du soleil qui vient s’épancher sur la pierre des murs en éclairant au passage une partie de la scène intimiste que le spectateur vient de surprendre.
Mais c’est sans doute la thématique de ses toiles qui retiendra le plus l’attention. Sandrine Gestin, en puisant dans nos légendes et notre imaginaire collectif, a réussi à mettre en scène des personnages imaginaires, à donner vie à des êtres féeriques.
Elle nous offre à voir des personnages que nous n’aurions jamais pu rencontrer ailleurs que sur des toiles, et cela est fait avec un tel talent que l’on se surprendrait presque à croire qu’ils sont réels ou qu’ils ont existé quelque part.
Le souci du détail renforce encore cette impression de réalisme : les entrelacs celtiques gravés sur la pierre ou peints sur les tentures, que Sandrine Gestin a ramenés, inconsciemment ou non, de sa Bretagne natale (elle est née à Quimper – Finistère). La richesse des vêtements sortis tout droit d’un autre âge. Les bijoux finement ciselés qui embellissent encore les personnages.
L’omniprésence de la pierre, qui réchauffe l’intérieur des pièces plutôt qu’elle ne les refroidit, et qui accentue encore le sentiment d’intimité cher à ses scènes d’intérieur.
C’est avec cette alchimie si particulière de réalisme et d’originalité, ce mélange de classicisme et d’innovation que les œuvres de Sandrine Gestin savent nous séduire, que nous soyons, ou non, amateur de fantasy.
Chrystelle Camus
Cet article est initialement paru dans Faeries 1 , été 2000, pages 85 et suiv.